Depuis, il s’est créé un lieu à la mesure de sa démesure. In situ, il vit et s’entoure de ses toiles inestimables, une manière de désacraliser l’art, les murs deviennent des plans d’accrochage, au gré de ses envies, de ses humeurs, de ses acquisitions, il dispose, déplace, change. Une belle manière d’habiter l’art et de se faire habiter par lui! De la fantaisie avant toute chose Et pour cela préfère le Décalé. Dans cette partition écrite à quatre mains par Mado et Jean-Louis Mellerio, comment ne pas déceler la touche inégalable des décorateurs qui est leur signature? Partout leur humour est palpable. Il donne à cet espace de luxe un côté irrévérencieux. Distillé par petites touches, leur style affiche clairement un parti pris osé et conformiste à la fois. Affirmé, un rien naïf, il se caractérise par un jeu de rayures franches, d’impressions graphiques, de taches de couleurs allant du gris au noir, du jaune au doré. Dans cette interprétation libre, les concepteurs ont rempli leur rôle, celui de fabriquer du bonheur au quotidien. Pari réussi. Après Amale Andraos et Lina Ghotmeh, Déco reçoit Roueïda Ayache, qui vient compléter sa galerie de portraits de femmes architectes. Diplômée de l’École spéciale d’architecture de Paris, elle est architecte associée au sein d’Architecture Studio depuis 2001. Prônant le travail en groupe et la réflexion en collectif, elle ne dit jamais «je» mais toujours «nous»! Elle participe avec ses partenaires à l’élaboration de l’ensemble des projets de l’agence. Une pratique qui les a portés à la conquête du monde. Forts de leur mixité de cultures, ils ont réussi à repousser les frontières du possible, en opérant une ouverture sur les mondes arabe, africain et asiatique. De passage à l’Alba, dans les lieux mêmes où Roueïda avait entamé ses études universitaires, elle est venue à la rencontre de ses anciens professeurs, ses camarades de promotion et des étudiants. Pratiquant le langage du coeur, elle a su communiquer son enthousiasme d’être là à Beyrouth, ville résiliente par excellence, elle a eu les mots justes pour leur parler de son métier, de son art, de sa mission. De Paris à Athènes, du Qatar à Bahrein en passant par Beyrouth jusqu’à Shanghai, elle témoigne de leur maîtrise des programmes complexes et de leur souci de contextualité, à travers des réalisations magistrales et des bâtiments iconiques.

Christiane Tawil