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ÉDITO

Dans ce numéro défilent des images venues d’ailleurs, une immersion dans la nature sauvage du Brésil, du Sri Lanka, qui témoignent d’architectures contemporaines de qualité intimement inscrites dans le paysage. Des lieux de vie qui se fondent dans le vert ambiant. Partout les frontières entre dedans et dehors s’estompent pour laisser place à une osmose totale. Les architectes apportent ici une leçon d’humilité en respectant scrupuleusement le rapport environnement et bâti.

En pratiquant une approche douce de l’architecture, ils renoncent à l’ampleur, au monumental, ne s’autorisant aucun grand geste, aucune sublimation, juste de l’harmonie. Le seul luxe concédé est un confort minimal, monacal presque! Du grand art qui cultive la réduction.

Même touche tout en épure et retenue pour le duo Kareen Andraos et Georges Mohasseb, lui-même designer, dans un appartement à Adma. Écrivant une partition à quatre mains, ils ont mené magistralement la refonte de l’espace en expérimentant les nouvelles formes de design, ils se sont attelés à modeler un schéma classique, voire banal, pour le transformer en un habitat au caractère moderne bien trempé. Dans un dialogue heureux et sans fausse note, ils ont prôné la qualité avant toute chose. Inspirés par l’ouverture sur la mer et l’abondante luminosité, ils ont conçu l’ensemble comme l’intérieur d’un vaisseau, matérialisant leur parti pris par des matières nobles: marbre, bois, cuivre. Avec une attention particulière portée aux détails, aux modénatures, les concepteurs ont tout dessiné: l’escalier en bois, véritable colonne vertébrale de la composition, le terrazzo du sol, le bar customisé, la table de salle à manger. Puisant dans le registre des lignes italiennes, ils n’ont pas lésiné sur le choix des meubles tout en évitant adroitement de tomber dans le bling-bling. Un bel exercice de style.

Il est lourd cet épisode de l’été 2019, un feuilleton noir qui a plombé les chaleurs estivales, troublé l’ambiance générale et ébranlé nos convictions.

On a assisté impuissant à un véritable pugilat, orchestré, manipulé, un acte sacrificiel sur l’autel de la vertu. La condamnation d’un groupe musical qui était parvenu à imposer son art, sa différence à la force de son talent, de sa créativité. On a vu des artistes qui se sont hissés à la proue de notre jeunesse muselés, jetés en pâture à la plèbe. Ceci n’est pas un acte gratuit, c’est Mozart qu’on assassine au pays du Cèdre! Au nom de la liberté, mais de quelle liberté en fait? La liberté étant la seule expression qui ne trouve son plein sens qu’au pluriel.

Christiane Tawil